André Breton, Diego Rivera et Léon Trotski au Mexique.

Focus sur une lettre érotique de Léon Trotski

Léon Trotski est l’un des plus grands révolutionnaires du XXe siècle. Son implication dans la Révolution d’Octobre est bien connue mais sa vie privée l’est beaucoup moins.

Aujourd’hui, nous avons souhaité mettre en avant pour ce nouveau Focus une importante lettre érotique adressée à sa femme et ainsi éclairer quelque peu la fougueuse relation qui liait ce couple.

En 1929, alors qu’il est expulsé d’Union soviétique par Staline, Léon Trotski entame un périple qui lui fera traverser divers pays : la Turquie, la France puis la Norvège et, enfin, le Mexique. Sa femme, la militante communiste Natalia Sedova, le suit dans ses peregrinations et reste fidèle à l’un des pères de la Révolution d’Octobre (l’autre étant Vladimir Ilitch Lénine).

Bien qu’inséparables, il arrive que le couple ne puisse se retrouver durant de longues semaines. Cela arrive en 1937 alors que Trotski à 58 ans et désire ardemment retrouver sa femme. Il laisse courir ses pensées sur le papier et lui écrit cette lettre au contenu vigoureusement érotique, dont voici un extrait traduit :

Extrait de la lettre de Léon Trotski, adressée à sa femme Natalia.

[…]

J’ai déjeuné. En m’allongeant, je lisais. Je me suis endormi (pas pour longtemps). Il est maintenant 3h et demi. Dans une demi-heure, le thé. Reporter la promenade ? Et s’il pleut. Je vais probablement y aller maintenant. Natalochka, que faites-vous maintenant ? Vous reposez-vous (de moi) ? Ou as-tu une opération ? Encore une inflammation ? Je voudrais que tu récupères complètement. Je voudrais pour toi une forteresse, la tranquillité, un peu de joie.

Depuis que je suis arrivé ici, ma pauvre bite ne s’est jamais levée. Comme si elle n’était pas. Elle aussi se repose du stress de ces jours. Mais moi, et non elle, je pense avec tendresse à une vieille chatte toute douce. Je veux la sucer, lui fourrer ma langue dans les profondeurs. Natalochka, ma chérie, je te baiserai encore fort avec ma bite et ma langue. Désolé, Natalia, il semble que c’est la première fois de ma vie que je vous écris des lignes comme celles-ci.

Je te serre très fort dans mes bras, serrant tout ton corps contre moi.

Ton L.

Cette lettre, ainsi que de nombreux autres documents, sont aujourd’hui conservés à la Bibliothèque universitaire de Harvard (bMs Russ 13.1 (10598-10631), dossier 8) dans un fonds contenant les papiers du dirigeant soviétique lors de son exil à Coyoacán, au Mexique.

Au Mexique, Trotski trouva un abri temporaire chez l’artiste Diego Rivera et sa femme Frida Kahlo. Certes, Rivera regretta probablement son hospitalité puisque le révolutionnaire eut une fougueuse liaison avec Frida et le bruit autour de cette liaison est l’une des raisons qui ont poussé Trotski et Natalia à quitter la maison des artistes plus tôt que prévu.

Léon Trotski, Diego Rivera, Natalia Sedova, Reba Hansen, André Breton, Frida Kahlo et Jean van Heijenoort à Coyoacán.

En 1940, Trotski est assassiné par un agent de Staline. Natalia Sedova décide de prolonger son séjour à Mexico et de rester en contact avec les milieux marxistes. Elle écrira, 11 ans plus tard, avec un autre révolutionnaire – Victor Serge – une Vie et mort de Léon Trotsky1.

Ainsi, le passage du couple au Mexique se termina d’une douloureuse manière. Tous ces moments étaient marqués, l’un après l’autre, par de douces retrouvailles et de difficiles éloignements et cette lettre en témoigne de manière passionnante.

Notes
  • Cette biographie a été rééditée par les Éditions La Découverte en 2010.

A. Duginova
A. Duginova
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