Fond : Antoine de Saint-Exupéry chez Silvia Hamilton, 1942. © Coll. Succession Saint-Exupéry-d’Agay. Livres : Antoine de Saint-Exupéry, Première édition du Petit Prince, 1943, Reynal & Hitchcock, New York (en français). © Fondation JMP pour LPP ; Antoine de Saint- Exupéry, Édition du Petit Prince en amharique, 1974, Addis Abeba. Traduction de Habte Maryam Markos. © Fondation JMP pour LPP.

Le Petit Prince pose ses valises à Paris

Pour la première fois de son histoire, une partie du manuscrit original du Petit Prince quitte les États-Unis pour se poser en France.

Du 17 février au 26 juin, une partie du manuscrit original du Petit Prince sera présentée par le Musée des Arts décoratifs de Paris dans le cadre de la première exposition majeure centrée sur le chef-d’œuvre d’Antoine de Saint-Exupéry.

Un conte marqué par la guerre

Bien que considéré comme le livre français le plus lu et le plus traduit au monde, Le Petit Prince n’a jamais quitté le sol américain.

En effet, l’aviateur écrivain avait rédigé ce conte philosophique à New York, où il était en exil, entre juin et novembre 1942. Un peu plus tard, l’auteur a confié le manuscrit à son amie proche, la journaliste américaine Silvia Hamilton, avant de partir combattre en Afrique du Nord au printemps 1943.

Le 6 avril 1943, le conte – qui sera le dernier ouvrage édité et publié du vivant de l’auteur – paraît aux éditions Reynal & Hitchcock et il faudra attendre trois ans pour que ce petit livre, qui avait pour objectif d’aider les enfants à oublier les rudes épreuves de la guerre, paraisse en France aux éditions Gallimard. Aujourd’hui encore, Le Petit Prince est l’un des plus grands succès du catalogue de l’éditeur.

Antoine de Saint-Exupéry — Première édition du Petit Prince, Reynal & Hitchcock New York (en français), 1943. © Fondation JMP pour LPP.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, Saint-Exupéry ne saura rien du succès colossal1 qui attendait son œuvre puisqu’il meurt pour la France lors d’une mission en Méditerranée en juillet 1944 ; son avion ayant probablement été abattu par un pilote allemand. En septembre 1998, un pêcheur marseillais retrouve dans ses filets la gourmette que portrait Saint-Exupéry. Cette découverte a permis de localiser, quelques années plus tard, des débris de son avion dans la même zone.

Entre temps, en 1968, Silvia Hamilton décide de se séparer du manuscrit et de le vendre à la Morgan Library où il est toujours conservé et chéri puisqu’il est, selon son directeur Colin B. Bailley, considéré comme leur « plus grand trésor ».

Une exposition unique

Le manuscrit original du conte, dont seules 35 pages sur 141 seront exposées, a pour la première fois traversé l’Atlantique, à bord d’un Boeing 777-300ER d’Air France – qui est d’ailleurs la descendante de l’Aéropostale pour laquelle travaillait Saint-Exupéry – entre New York et Paris.

Le pilote, Jean-Michel Buffet, se confiait sur France Télévision : « […] c’est la lecture de Saint-Exupéry, de Kessel, de Romain Gary, tous ces gens qui ont été pilotes, qui m’ont vraiment donné cette vocation de pilote de ligne ». Et c’est avec émotion que le personnel de la compagnie annonçait, sur Twitter, le transport du célèbre manuscrit :

Outre ce chef-d’œuvre, ce sont plus de 600 pièces qui seront rassemblées pour retracer la vie et l’œuvre de Saint-Exupéry : extraits de presse, manuscrits, photos, poèmes, lettres manuscrites et dessins inédits.

Antoine de Saint-Exupéry — Le petit prince assis sur son astéroïde, devant un parterre de fleurs. © Fondation JMP pour LPP.

Au programme, une salle consacrée à la vie de l’auteur, en particulier son enfance, dévoile des indices pour aborder son œuvre la plus célèbre, Le Petit Prince. Un espace retrace son accident d’avion, qui constitue le chapitre central de Terre des Hommes, et marque le point de départ du Petit Prince.

Une autre partie explore la place fondamentale qu’occupe le dessin dans la vie de l’écrivain2, pour qui ce moyen d’expression représente une manière d’être en lien avec son enfance. On dit d’ailleurs que le personnage du Petit Prince est né d’un simple dessin sur la nappe d’un restaurant new-yorkais. L’exposition met aussi en avant deux figures capitales dans la vie de l’auteur : son épouse Consuelo, qui inspire le personnage de la Rose, et son ami proche, le romancier Léon Werth à qui le conte est dédié.

La disparition de l’auteur, mort en héros, contribue à sacraliser l’ouvrage et, pour conclure le parcours, le musée met judicieusement en avant la dimension universelle de son œuvre avec la présentation de 120 éditions étrangères parmi les 500 langues et dialectes dans lesquels le livre a été traduit.

Notes

J. M. Sultan
J. M. Sultan
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