Galilée démontrant les nouvelles théories astronomiques à l'Université de Padoue, Félix Parra (1845-1919), 1873, Museo Nacional de Arte

Une lettre retrouvée prouve que Galilée a modifié ses propos devant l’Inquisition

Ignorée dans les rayons de la Royal Society depuis 250 ans, une lettre retrouvée de Galilée indique les corrections effectuées par le scientifique dans le but d’apaiser l’Église et d’échapper à l’Inquisition.

Cette découverte dévoilée par la revue Nature est, encore une fois, le fruit du hasard. Salvatore Ricciardo, un historien en post-doctorat à l’Université de Bergame, a fait resurgir en août dernier une lettre, signée de la main de Galilée, que les historiens recherchent depuis le XVIIe siècle. Cette dernière était simplement mal classée dans les archives de l’institution anglaise.

Signée « G. G. » – pour Galileo Galilei -, la lettre est d’une longueur de sept pages, porte une écriture similaire à la lettre de Galilée conservée au Vatican et expose des corrections de la main du scientifique afin d’apaiser l’Église.

Galilée

Célèbre mathématicien et astronome pisan, Galilée a été de nombreuses années dans le viseur de l’Inquisition, une juridiction créée au XIIIe siècle par l’Église catholique dont le but était de combattre l’hérésie.

En 1632, Galilée publie Dialogue sur les deux grands systèmes du monde dans lequel il compare le modèle géocentrique d’Aristote et Claude Ptolémée – un modèle physique qui place la Terre au centre de l’Univers – et celui de Nicolas Copernic, l’héliocentrisme, exposé 70 ans plus tôt par l’astronome polonais.

L’année suivante, Galilée est arrêté, condamné pour avoir soutenu l’héliocentrisme et son livre est interdit. Se retrouvant à l’opposé du dogme soutenant le géocentrisme, Galilée est condamné à la prison et échappe au bûcher en se rétractant. Finalement, le pape commue sa peine en une assignation à résidence surveillée à Arcetri, près de Florence. Il meurt neuf ans plus tard, à l’âge de 77 ans.

Ce qui provoqua cette condamnation, c’est une lettre que Galilée envoya vingt ans plus tôt, le 21 décembre 1613, à un ami mathématicien à l’Université de Pise, Benedetto Castelli.

La lettre de Galilée adressée le 21 décembre 1613 à Benedetto Castelli. © The Royal Society
La lettre de Galilée adressée le 21 décembre 1613 à Benedetto Castelli. © The Royal Society

Deux versions de la lettre

Les historiens savent depuis plusieurs siècles que deux versions de cette lettre existent.

La première, aujourd’hui en possession des archives du Vatican, est celle envoyée à l’Inquisition le 7 février 1615 par un frère dominicain nommé Niccolò Lorini. Celle-ci révèle un scientifique beaucoup plus critique envers l’Église et les théologiens. Ainsi, le savant explique que les ecclésiastiques n’ont « pas la compétence pour juger ces choses » et se réfère à un passage de la Bible comme étant « faux au sens littéral des mots ».

Dans la seconde version, retrouvée il y a quelques semaines par Salvatore Ricciardo, Galilée corrige, efface et rature des passages qui pourraient lui nuire. Par conséquent, le mot « faux » est ainsi remplacé par « semble différent de la vérité ». Le 16 février 1615, une fois ses propos atténués, Galilée écrit à son ami Piero Dini, un religieux romain, et suggère que la version envoyée par Lorini à l’Inquisition aurait pu être falsifiée. Galilée joint à cette lettre la version corrigée du document, qu’il a qualifié de correct, et demande à Dini de le transmettre aux théologiens du Vatican, se plaignant de la « méchanceté et l’ignorance » de ses ennemis et exprimant sa crainte que l’Inquisition « ne soit en partie trompée par cette fraude qui se déroule sous le manteau du zèle et de la charité ».

Malheureusement, le mal est fait et, 17 ans plus tard, l’Inquisition réagit à la publication du Dialogue sur les deux grands systèmes du monde et débute l' »Affaire Galilée ».

Liens

J. M. Sultan
J. M. Sultan
Publié le
Mis à jour le
Actualités Lettres